Nouvelles et poésies
Recueil
de Nouvelles et Poésies
d’hier, d’aujourd’hui et demain
de Renée Gincel
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LE SQUAT
Elle venait d’obtenir son urne, mais les places étaient chères dans les cimetières.
Surtout, elle ne voulait pas rester seule. Puisque durant sa vie elle l’a été pendant de trop nombreuses années.
Ne sachant où elle pourrait aller se loger pour l’autre monde, elle se mit à rechercher, parmi ses proches amis, celui ou celle qui aurait un peu pitié d’elle afin de lui céder un petit hébergement funèbre.
Tous possédaient leur propre emplacement familial.
Mais comment faire si les membres vivants de ses amis n’acceptaient pas une intruse, une étrangère, une squateuse de concession mortuaire.
Scandale dans les familles. Ruptures de contacts entre ceux qui acceptaient la squateuse et ceux qui par déontologie morale la refusaient.
Au final, une partie de cette descendance subissait ainsi une atteinte aux respect de leurs morts.
C’est pas chrétien disaient les uns. C’est généreux disaient les autres.
Bref la rupture familiale était prononcée.
Elle finit par mendier auprès l’un de ses proches amis, dont la concession se trouvait dans une province retirée, de bien vouloir l’accepter dans sa dernière demeure.
Seulement ce tendre ami, qui fut durant de nombreuses années assez intime avec elle, fut fort surpris de cette demande non moins surprenante.
Car dans son caveau familial, résidait déjà ses parents et autres membres de sa famille.
Comme Il savait qu’elle était d’une jalousie excessive à son égard. et qu’elle n’avait de cesse de lui attribuer une colonie de maîtresses.
Alors, il ne lui refusa pas de venir dormir pour toujours à ses côtés.
Seulement lui dit il : « il te faudra partager la place avec Françoise, Jeannine, Sylvie, Catherine, Sonia, Nathalie, et bien d’autres encore ».
PARIS
Tu me plais de plus en plus, et pourtant je n’ai parfois qu’un désir, celui de t’échapper tous les dix ans.
Fuir au loin, le plus loin possible.
Traverser des océans pour ne plus voir la grisaille de tes immeubles.
Ne plus sentir la moiteur de ton climat pollué par les automobiles, et l’odeur d’œuf pourri de ton métro.
Je ne sais plus pourquoi j’ai tellement et toujours tant d’affection pour toi.
Tu es belle, attrayante, riche d’histoires, la seine qui coule en ton centre arrose d’une lumière exceptionnelle tes sublimes monuments.
Mais tu as tellement changé depuis ces cinquante ans.
Tu es épuisante, ta population est agressive et tes rues sales…
Tes marchés si populaires autrefois, sont devenus des galeries d’art de l’alimentation, les charmantes plaisanteries d’autrefois entre clients et commerçants n’existent plus..
Argent, argent, euros, le motif de ton existence d’aujourd’hui.
Je t’ai tant aimé autrefois, lorsqu’au coin de tes rues les accordéonistes et chanteurs de rues plein de talent
entraînaient les passants à chanter des refrains populaires.
Et à chaque printemps dans tes avenues on pouvait voir les défilés de voitures fleuries….
C’était autrefois.
Mais aujourd’hui, je retrouve encore le plaisir de me balader dans tes rues animées,
la lumière de tes monuments restaurés, et la Seine qui sous le soleil de l’été brille de mille diamants.
Quand je te quitte, je suis toujours émerveillée de te retrouver.
GENERATION BASKET
Ils ont tous le même uniforme, un jean délavé, ou troué, et des baskets à lacets.
Ils ont vingt ans, trente ans et plus,.
Impossible de les différencier. Est ce des garçons? Est-ce des filles ?
Vu qu’ils sont habillés à l’identique, il n’y a donc plus de différence de sexe
Certains sont tatoués afin de mieux ressembler aux tribus indigènes, ou mieux encore à nos ancêtres Cromagnon et à l’Homo Habilis.
Adieu, le costume cravate de Monsieur, adieu le tailleur Saint Laurent de Madame; Les voila réduit au strict minimum vestimentaire.
Alors pourquoi n’utiliser dans un avenir proche qu’un slip petit bateau en coton l’été, et en hiver une peau de mouton ?
Et puis si comme l’ancêtre de la pré-histoire, ils revenaient à la nudité avec leur corps entièrement tatoué en guise de vêtements.?
Fini, le commerce du textile, il restera le commerce du corps tatoué et du basket à lacet pour l’hiver.
Puis, pour communiquer ils auront toujours et encore ce merveilleux petit appareil qu’ils appellent « mobile » sur lequel ils sont branchés nuit et jour.
Que se passera t il si dans un proche avenir les satellites qui tournent au-dessus de leur planète pour leur procurer cette manne d’informations et de communications, venaient en un instant à ne plus pouvoir fournir toutes données, puisque une météorite aura détruit tous ces satellites qui ne font plus qu’un anneau autour de leur planète.
On les verra déboussolés, ayant perdu tout repère, que deviendront-ils ?
Espérons, qu’ils se re-saisiront pour un univers meilleur, versés vers la nature, et enfin communiquer physiquement avec leur prochain.
LA MORT D’UN PIGEON
Un automne exceptionnel où pour l’espace d’un moment la nature avait pris rendez-vous avec le printemps. Mais pour l’animal, qui gisait immobile sur le bord du perron de l’hôtel, l’hiver était trop proche.
Paul confortablement installé dans un fauteuil rouge attendait sa femme Karel à la réception de l’hôtel. Apres une dernière retouche à son maquillage elle le rejoignit pour une longue promenade en bord de mer.
En sortant de l’hôtel, une lueur particulière aveugla Karel bien que le soleil était à son zénith, elle ne pouvait pas échapper à la vision d’un animal inerte sur le sol et dont le regard croisa le sien. Elle eut un certain malaise en voyant ce pigeon, sans doute agonisant.
La bête l’observait ou bien était-ce elle qui s’imaginait être observée ? Et sans pouvoir se l’expliquer son corps s’immobilisa, elle ressentit d’étranges sensations et, fort heureusement, ces sensations ne durèrent pas longtemps mais son esprit fut traversé
Par une curieuse impression d’horreur et de dégoût. Et un grand froid s’empara de son corps. Pourquoi fut-elle soudainement si effrayée ? Pourquoi croyait-elle que ce pigeon, peut être mort, était pour elle un signe de mauvais présage ? Sans que tout ceci n’était que le fruit de son imagination, mais Karel avait réellement ressenti des émotions qui l’avaient fortement perturbée. Paul s’approcha d’elle, elle sursauta et se mit à rire nerveusement, comme un peu gênée d’avoir été surprise dans ses pensées et d’avoir manifesté un tel trouble..
Au bras de son mari, elle désirait oublier les affres de son imagination. La plage leur appartenait. Ils étaient libres. L’odeur iodée, le bruit des vagues, le soleil et le crissement du vent les transportaient dans une divine plénitude. La nature en cette saison les rendait heureux. Ils n’échangèrent aucune parole, seuls à longer le bord de mer en se laissant bercer par le va-et-vient des vagues en cette merveilleuse journée d’automne.
Au coucher du soleil, la mer prenait une couleur brun orangé et les vagues jetaient du cristal sur le rivage. La nuit arrivait et Paul suggéra d’aller prendre un café avant de rentrer à l’hôtel.
Installés à une terrasse, ils savouraient les derniers instants de cette belle journée et étaient ravis d’être les seuls clients. Paul devait malheureusement retourner en ville, dans la soirée, pour des raisons professionnelles et cela affecta Karel qui ne voulait de ce départ0 Il lui prit la main et, dans l’un sourire, lui dit qu’il l’aimait et qu’elle n’avait rien à craindre. Et surtout que l’air de la mer lui ferait le plus grand bien. Il lui promit de revenir au plus tôt.
Soudain elle eut l’impression que son sang se glaçait, elle devint blême, son cœur se mit à battre très vite et elle resta ainsi durant quelques secondes figée devant son mari.
Perturbée par ce qui lui arrivait et dont elle ne semblait pas comprendre la cause, elle demanda à Paul de la raccompagner à l’hôtel car elle se sentait très fatiguée.
Paul ne s’inquiéta pas davantage, car Karel présentait souvent de grands états soudains de fatigue. Après avoir chaleureusement embrasse sa femme, il repartit vers la ville.
Restée seule dans sa chambre d’hôtel, allongée sur le lit, elle n’arrivait pas à s’endormir. Elle était très agitée, bouleversée et inquiète. Elle ne comprenait pas ce qui lui arrivait et ne dominait plus du tout ses angoisses. Soudain un malaise suivi d’un dégoût l’envahit, comme quelque chose d’inhabituel qui s’installait dans son corps. Un frisson la parcourut. Elle essaya de se lever, mais en vain. Elle resta clouée sur son lit comme si une force invisible la retenait. Était-ce encore le fruit de son imagination ? Mais plus elle réfléchissait et plus elle avait mal et froid.
Enfin au bout d’un certain temps elle finit par s’assoupir. À son réveil, son regard fixa le rebord de la fenêtre et, à son grand étonnement, elle crut apercevoir le pigeon. Peu rassurée et chancelante, elle se rapprocha de la fenêtre. L’animal était bien là qui la regardait fixement. Saisie par le regard de feu du pigeon, elle voulut reculer, mais se rendit compte que son corps restait immobile. Elle voulut crier mais aucun son ne sortit de sa gorge.
La vitre éclata alors en mille morceaux, et l’animal se mit à grossir, devint une sorte de monstre recouvert de sang. Il survola Karel et alla se placer au centre du lit.
Son regard injecte de sang de poussières continuait à fixer Karel. Elle essayait vainement de sortir des sons, de lancer des appels au secours, mais rien, comme si elle était devenue muette.
L’animal prit des proportions démesurées, son bec ensanglanté laissait apparaître des crocs aiguisés. Karel n’arrivait plus à penser, elle eut l’atroce sensation que ses chairs étaient déchiquetées, que ses membres se détachaient de son corps. Elle ne saignait pas, des odeurs de pourri lui remontaient dans la gorge. Tout en elle se déformait. Une odeur nauséabonde de souffre envahit la chambre. La bête devenue monstrueuse saignait de partout.
À ce moment elle cru revoir la mort de son père. Karel s’était elle réincarnée dans ce pigeon ? La bête ayant pris des proportions anormales se mit à aspirer la peau de Karel, ses os, son sang, son âme. Karel restait consciente de ce qui lui arrivait et, bien qu’elle eût la sensation d’être physiquement déchirée et de ne plus exister, seul son regard restait vivant et à travers sa lente agonie dans le corps du pigeon, elle vécut l’angoisse de sa propre mort.
L’ART DU MEPRIS
Un soir je m’étais rendue dans un théâtre, non pas pour assister à la représentation qui s’y jouait, ou correspondait à mes goûts artistiques, mais bien pour y rencontrer un comédien, que je ne connaissais pas vraiment… Disons qu’on s’était entrevu parfois.
Afin de construire mon réseau professionnel, même si cela s’avère être une entreprise laborieuse, il faut savoir jouer les hypocrites, de pas être sincère et sourire …toujours sourire. Et plus encore rire, rire bêtement.
Faire croire que vous avez aimé, alors que vous avez détesté.
Bref démontrer tout cela en quelques secondes. Du grand art.
Je m’étais déplacée uniquement pour aller le voir à la sortie de son spectacle, en croyant crédule, que je serais toute seule à le féliciter ce soir-là.
La pièce commence, je m’ennuie à mourir…ce grand comédien n’intervient toujours pas…bref je m’emmerde…
Enfin il fait une apparition au 4e acte, où il s’évanouit, dans la pièce, et on le sort. On le revoit un peu plus tard avec un monologue, puis c’est la fin de la pièce.
Les bravos n’en finissent pas, à croire que la salle entière avait été invitée.
Public conquis ou ami…..?
À la sortie, une foule admirative l’attendait, j’en faisait partie mais pas pour les mêmes raisons, moi c’était pour entretenir mon réseau, croyant, naïvement , que c’était la meilleure solution pour y parvenir.
Il sortit en dernier, alors qu’il n’avait pratiquement pas eu de maquillage, ni de changement de costume, c’est tout un art chez certains comédiens de se jouer le star système.
Mais qu’importe, un grand doit savoir se faire désirer. C’était son cas !
Enfin, il arriva, je commençais à m’inquiéter… Car j’avais peur de louper le dernier métro et de devoir rentrer à pieds.
Il était très entouré et très félicité par un public ami, alors je me suis glissée dans cette foule et j’ai fait « hou, hou » il ne me remarqua pas, je repris plus fort encore et j’ai crié « Bravo, très bien » il releva la tête et dans un sourire artificiel me remercia, fit peut être semblant de ne pas me reconnaître. Et sans même me remercier retourna vers ses admirateurs en une longue conversation sur son moi-je.
Alors, je repris de plus belle et en criant presque pour être entendu : « Vous étiez très bien quand vous vous êtes évanoui, c’était vraiment vous ! »
Silence général. Bref je venais de dire une connerie. Il a relève la tête, en ayant l’air de me dire « Pauvre conne t’as rien compris » enfin c’est ce que son regard et celui de ses admirateurs m’ont fait ressentir.
Voilà, je n’étais pas du tout prête pour le réseau.
GRANVILLE
Sans date, car tout est ralenti…
Mon corps est infirme face au spectacle de la marée montante.
Assise sur un rocher, le visage fouetté par le vent et le soleil, je me laisse bercer par ces doux embruns.
Au loin, les mouettes lancent leurs derniers cris, car la mer va bientôt envahir mon petit coin tranquille, où je m’étais attardée pour observer ce paradis entre ciel et mer.
Mélangés au vent, le bruit des vagues et les cris des oiseaux font régner une douce tranquillité.
C’était l’équinoxe d’automne et la mer commençait à se déchaîner.
Les mouettes étaient allé se réfugier en ligne sur la haute digue.
L’air était si vivifiant que je ne voulais plus bouger.
Ce paradis, sans toi, sans ton regard devenait angoissant.
J’aurais tant aimé échanger ma vision de ce paradis avec toi
Mais c’était un faux espoir.
Blottie au creux de mon rocher, j’ai re-songé à toi et regretté de t’avoir aimé si aveuglément.
En observant la mer qui se déchaînait sur la falaise, J’ai cherché de toute mes forces à extraire de ma mémoire l’insoutenable misère de ton incompréhension.
Les vagues venaient se fracasser sur le sable en formant milles éclats de lumières et retombaient dans l’eau verte et grondante.
Le vent s’était levé. Le ciel s’était assombrit pour laisser la place à une pluie torrentielle.
Je suis restée là, immobile, paralysée, croyant que tous les éléments de la planète s’étaient soudain accordés pour me punir.
Mais le spectacle qui s’offrait a mes yeux était éblouissant.
Je compris, à ce moment que la nature était d’une force incroyable et que je n’étais face à elle qu’un microbe.
Puis au bout d’un certain temps, ce fut le calme. Le vent balaya les nuages et la pluie, le soleil revint.
La mer s’était retirée, laissant derrière elle une plage au sable purifié.
Sur les rochers creusés, battus et sculptés par elle, les mollusques
S’accrochaient pour ne faire plus qu’un avec la roche.
Tout ici lui appartenait
À la marée basse, elle m’abandonna une partie de son territoire.
En en se retirant elle m’avait montré sa puissance et surtout sa sublime faculté à créer de nouvelles vies et formes. C’était émouvant.
Lorsque, reprenant mes esprits, prête à quitter ce lieu magique, j’eus une profonde tristesse en pensant que nous les humains nous ne la respections pas assez, car sans elle nous n’existerions même pas.
HOMMAGE AUX SITES DE RENCONTRES
Urgent ! Peux plus rester seule !
Je me suis connectée
Comme tout le monde, enfin comme toutes celles
Qui un jour ou l’autre se retrouvent seules.
On me disait que ça marchait, alors j’ai essayé.
J’y ai découvert un nombre incalculables de ces sites,
Des gratuits, des payants, des lents, parfois sans photos
Et des avec photos, et des textes qu’il fallait décrypter.
Je me souviens de l’un d’entre eux, qui se décrivait comme :
Homme libre, généreux, bien de sa personne ….bref un canon
Je lui ai écrit, puis il répondit en me fixant un rendez-vous un café parisien.
En arrivant sur le lieu dit de notre première rencontre, je vis arriver un homme qui ne ressemblait pas du tout à sa photo, mais j’étais là et j’essayais de faire bonne figure.
Lui m’avait reconnu. Il s’approcha et s’assit en face de moi.
Un certain silence régna, puis d’un seul coup après m’avoir observé de Long en large. Il se leva et dit qu’en effet je n’étais pas la déesse qu’il espérait. Et il partit en me laissant payer les consommations.
Je suis restée interdite, quand je pense qu’il avait au moins 15 ans de plus que moi, qu’il était chauve avec un dentier qui se décollait de sa mâchoire dés qu’il ouvrait la bouche. Je réussis à le rejoindre à l’arrêt de son bus, et là je n’ai pas pu m’empêcher de lui dire avec fierté
« Heureusement qu’il y’a encore des tarés dans votre genre qui osent croire
au père Noël. » Et je suis partie en courant vers la bouche de métro la plus proche.
Et c’était pratiquement toujours le même genre de rencontre.
Lorsque ce n’était pas un plan sex, auquel je n’adhérais pas, c’étaient des tordus qui s’attendaient à trouver la merveille des merveilles, sachant qu’eux mêmes étaient bien loin de la perfection ou même du simple idéal.
Alors je me suis orientée sur d’autres sites qu’on appelle les speed dating . Rencontres rapides et personnalisées soit disant.
Comme ce n’était pas gratuit, je me suis dit que j’aurais peut être plus de chance de rencontrer mon futur compagnon.
Donc le jour J arriva et je fus convoquée dans un grand hôtel parisien.
Pour la circonstance je m’étais mise sur mon 31, ce qui me prit plusieurs heures.
Mais dans ma précipitation, car je croyais être en retard, j’avais oublié de déposer mon sac poubelle. Et dans ma distraction je l’ai traîné tout au long de la ligne 9 du métro
Je ne comprenais pas trop pourquoi le compartiment où je me trouvais se vidait.
J’étais tellement dans ma pensée d’une rencontre parfaite que j’avais oublié mes ordures. Et c’est en arrivant à l’hôtel lorsque le concierge me fit signe vers le sac en se bouchant le nez car l’odeur au bout d’une heure de trajet était super forte, que j’ai réalisé…
J’ai couru au wc pour m’en débarrasser, je fus bien gênée
Puis une charmante hôtesse vint me prendre à la réception
Elle me plaça à une table où se trouvai ent déjà deux autres couples qui attendaient. Personne n’osait se regarder.
Elle fini par me donner un numéro, j’avais l’impression de me retrouver à la sécurité sociale, sauf que le cadre était nettement plus agréable et sentait moins la sueur des longues attentes.
Après une certaine attente, on finit par appeler mon numéro
Puis on m’installa à une table recouverte d’une nappe vert pomme.
Je vis arriver un beau jeune homme, une presque figurine de magazine.
Alors que je m’apprêtais à me présenter, dans un souffle pour lui donner ne serait-ce que mon prénom, une sonnerie retentit et je le vis brusquement se lever pour aller s’installer à une autre table où attendait une autre femme. J’allais me lever, mais l’hôtesse me fit signe de me rasseoir.
Un autre homme arriva super mignon, s’installa en face de moi.
Et alors même scénario que pour le premier, et re-sonnerie sans avoir eu le temps de se présenter.
Ce fameux soir, il y eut six contacts muets car il fallait aller vite pour rencontrer un maximum de
personnes de l’autre sexe.
D’ailleurs au bout du sixième je me suis demandé si ce n’était pas une grosse plaisanterie ou bien que je devais soudainement être atteinte de surdité.
Ou mieux que j’avais perdu ma voix.
Ainsi les rencontres rapides pouvaient se résumer par : 1. Assise, 2. Sourire. 3. Ouvrir la bouche, 4.Essayer de se présenter 5,.Se soulever à peine de sa chaise comme pour dire au revoir, 6.Attendre quelques secondes que le suivant arrive s’installer en face de vous et recommencer,
Temps global d’exécution pour le speed dating 5 minutes, juste ce qu’il faut à chacun de se
regarder dans le blanc de l’œil de savoir si il vous convient.
Alors je suis rentrée chez moi, sans l’âme sœur avec mes désillusions et un sac poubelle en moins.
J’ai ouvert mon frigo et me suis avaler 1kg de glace au chocolat.
Le bonheur…
IL ETAIT DES FOIS
C’est l’histoire de « Il était une fois » ou plutôt « Il n’était pas une fois mais des fois »….
Enfin bref ce n’était pas un conte de fées.
Quoique à bien regarder on aurait pu s’y méprendre.
Chaud cet été, le bitume collait à ses chaussures. On sentait qu’il avait besoin d’air frais car notre héros transpirait beaucoup ce jour-là.
C’était l’heure de la pause-repas et comme le disait fréquemment ses collègues de bureau lorsque les douze coups de midi et non pas de minuit sonnaient à St.Patrick « let´s take five » dans leur jargon cela signifie jazzy : « on s’arrête et on se fait une bouffe ».
Dans le cas précis de notre héros cela signifiait :
« Chouette je vais l’aller m’enfiler un sandwich saucisse-moutarde au Parc.
Il y fait bien plus frais et au bord du lac je serais très à l’aise pour lire »
Il finit par s’asseoir sur un banc ou des pigeons avant lui avaient marqués le territoire.
Il y plaça quelques feuilles de son journal, pour ne pas abîmer son costume 3 pièces en flanelle grise. Et le plus tranquillement du monde, il se mit à lire son journal tout en entamant son sandwich saucisse-moutarde.
Il était imbécilement heureux à ce moment précis.
Elle, la bourgeoise de la 5e avenue, un peu has been, un peu provocatrice et assez jetée du plafond, se décida, ce jour-là, de traverser le parc pour aller rendre visite aux gorilles du zoo qui stationnaient à vie au milieu du parc derrière de solides grilles d’acier.
Elle fonça droit vers les cages des gorilles avec un sac plastique rose rempli de petites merdes salées. Elle voulut faire si vite pour rejoindre ses copains poilus, qu’au moment même où elle passa devant notre héros, son talon aiguille s’accrocha à une pierre mal scellée, elle trébucha, cassa sa chaussure et fini par tomber par terre.
Notre héros, galant, se précipita pour la relever. Elle était très mal.
Mais était-ce parce qu’elle s’était blessée en tombant ou bien parce qu’elle avait cassé sa chaussure, qui avait dû lui coûter très cher. Une chaussure unique reliée par un petit bout de ficelle dorée.
Notre héros très poli, s’empressa de la relever.
Lui
Vous vous êtes fait mal?
Elle
Vous voyez bien, non, je suis par terre.
Lui
Oui, effectivement. Je m’en aperçois. Est ce que vous n’avez rien de cassé ?
Elle
Si, ma chaussure; Mon unique modèle. Une chaussure hors série.
Faite sur mesure pour moi par Smolle BRoke et compagnie.
Impossible à réparer pour mon 44 fillette, Cette pure merveille.
Qui désormais pourra à nouveau reconstituer ce délicat fil doré
Qui reliait mon gros orteil à mon petit doigt de pied ?
(Et elle se mit à pleurer, tant et si bien que tout son maquillage dégoulinait).
Lui
Permettez-moi de vous prêter un kleenex neuf. Je crains que vous n’abimiez votre joli corsage dont la transparence me. Laisse entrevoir de charmants appâts.
Elle
(Un peu gênée)
Oh monsieur vous allez me faire rougir.
Mais comment vous remercier pour le kleenex…
Je ne sais si je dois…enfin pardon, je…merci beaucoup pour votre aide… Je n’ose…
Lui
Si, si prenez, c’est de bon cœur.
Elle
(Prenant délicatement le kleenex offert)
Merci
Lui
Vous savez j’en ai plein ma sacoche. Surtout n’hésitez pas à vous servir.
Je n’ai aucun scrupule car je suis le président de la société Kleenex Mentor & Cie. Son PDG si vous préférez.
Elle
(toujours assise parterre tendit les mains pour qu’il l’aide à se relever)
(Puis ils s’assirent sur le banc).
Vraiment, monsieur, tant de courtoisie dans ce monde de brutes..
Vous êtes trop aimable de m’aider ainsi, de m’offrir, sans me connaître votre sacoche pleine de kleenex.
Lui
Oh mademoiselle çeci n’est rien du tout pour moi. Je peux faire plus encore. Et si vous le souhaitez, je voudrais faire moi-même la réparation de votre. chaussure unique. Et j’aurais le plaisir, si vous le voulez bien, d’y faire rajouter une perle blanche juste au milieu du fil doré qui soutiendra votre gros orteil.
Elle
Vraiment, vous pourriez le faire ?
Lui
Woui
Elle
Monsieur, je suis gênée devant tant de générosité. J’accepte.
Ainsi pendant les longues soirées d’hiver je pourrais enfiler des perles à mes chaussures ? Monsieur votre délicatesse m’honore.
Lui
Et mieux encore, je viendrais moi-même vous aider à enfiler vos petits petons. Dans vos nouvelles et magnifiques chaussures
Elle
C’est trop de bonheur
Tenez voici la paire en souvenir de moi.
(Elle dépose les chaussures dans les mains de notre héros, l’embrasse sur le front et s’enfuit pieds nus vers la cage aux gorilles)
Lui
(Surpris de ce départ précipité). Attendez mademoiselle. Attendez, revenez
( courant vers elle, il la rattrape, l’empoigne par la taille, et alors…)
Elle
(Toute souriante et un peu coquine)
Et alors…
Lui et elle
Et alors…
Lui
Moi c’est Gustave
Elle
Moi, Cunégonce
Et ils s’en allèrent bras dessus bras dessous vers la cage aux gorilles, franchement on ne sait pas s’ils vécurent heureux et si ils eurent beaucoup de petits poilus..
L’ATTENTE
Si tendre
Si tentant
Ce fruit suspendu a la branche de l’arbre
Lorsqu’il tombera au sol
Tu le ramassera
Tu le goûteras
Tu le savoureras
Ce sera si bon
Si frais
Alors toi et moi
Comprendrons enfin
Pourquoi il nous a fallu attendre.